1. Paulo Paul

Du point de vue onomastique, le nom du personnage annonce déjà ce qui s'en vient : il est redondant, autant sur le plan sonore que sur le plan visuel.


2. routines quotidiennes

Paulo Paul serait-il déjà prédisposé à revivre continuellement les mêmes choses ? Son métier reflète ce qu'il s'apprête à vivre de façon plus étrange.


3. cette journée comme les autres

Voilà un indice supplémentaire de la redondance qui marque la vie quotidienne du personnage : il a déjà, par la force des choses, par nature presque, l'habitude de toujours faire les mêmes choses.

Du point de vue sémantique, l'expression "cette journée comme les autres" fait aussi référence au fait que rien d'anormal ne se fait sentir et que rien n'indique qu'il faille s'inquiéter de cette journée plus que d'une autre.


4. minuit

Le titre de cette nouvelle est déjà porteur d'un sens important : comme le dit Michel Serres dans son analyse de Sarrasine de Balzac, minuit correspond à ce moment où aujourd'hui bascule vers demain. Dans la nouvelle de cette étudiante, tout repose sur le temps. Minuit devrait correspondre à une période de renouvellement, de métamorphose. Un  peu comme dans le film Le jour de la marmotte, le protagoniste ici franchit le seuil de ce qui devrait être une autre journée... alors qu'en réalité il est condamné à vivre toujours la même.


5. Comme à tous les matins

Le narrateur insiste beaucoup sur les marqueurs de temps dans cette nouvelle. Celui-ci a pour but d'indiquer, encore une fois, que Paulo Paul a des habitudes bien stables, inchangeantes  -- c'est donc, dans la narration, une répétition d'une mention visant à indiquer que l'histoire se répète ! (En effet, c'est la seconde fois en deux paragraphes que le narrateur fait référence à l'idée de répétition des actions.)


6. Quelqu'un qui aurait su...

Cette phrase signale de manière ironique que, justement, le cerveau du  personnage sait ce qui va se produire ; seulement, c'est Paulo Paul qui ne se le rappelle plus, puisque sa mémoire récente semble s'effacer jour après jour.


7. Vous savez, madame, le cerveau enregistre...

Voilà un remarque très intéressante. D'une part, elle explique scientifiquement comment l'épisode de la tasse de café (analysé  dans la note précédente) semble possible. D'autre part, la remarque fait appel à la science et sert, dans le contexte de cette nouvelle, d'interactant dans la relation dialogique nécessaire au fantastique : Paulo peut encore trouver refuge, à ce moment, dans une explication rationnelle qui découle de la science. (Ce sont donc les connaissances de Paulo sur la science et sur la mécanique du cerveau qui campent ici le rôle de l'interactant.)


8. qui lui semblent avoir débuté il y a déjà une éternité

Indice de modalisation : "lui semblent" sert ici à contaminer le lecteur du doute du personnage. Paulo n'a plus le pouvoir de sortir de l'engrenage demain = aujourd'hui, alors il est normal que ce qui s'est passé avant cette journée répétitive paraisse éloigné...


9. toujours recommencer les mêmes trajets...

Comme il en a été question à la note 2 à propos de ses routines quotidiennes, il est permis de se demander si Paulo, par nature, n'est pas prédestiné à revivre continuellement les mêmes actions : même son métier n'offre rien de neuf et l'amène littéralement à parcourir le même trajet,  à reproduire les mêmes automatismes jour après jour.

Voilà un bon exemple de détail qui permet de donner son essence au personnage sans qu'on ait pour autant à le dépeindre en entier.


10. le temps... quelle notion fluide et difficile à comprendre

Question très pertinente, en effet ! Cette remarque peut servir de mise en abîme dans la nouvelle, puisqu'elle résume l'essentiel de ce dont il est question dans le récit : un personnage qui est aux prises avec la notion du temps. Très bien pensé de la part de l'auteure.


11. ne s'est pas rendu compte qu'il est déjà dix-sept heures

Autre signe que Paulo éprouve des problèmes à bien discerner les indices temporels.


12. Encore ? Il me semble que tu viens de t'en acheter un.

Hésitation typique du fantastique : l'heure-frontière qu'est minuit est perméable et permet à Paulo de voir poindre quelques images, quelques impressions provenenat d'une version antérieure de cet aujourd'hui éternel.

Par ailleurs, la réponse négative de l'interlocutrice de Paulo signifie au lecteur que seul le protagoniste revit la même journée : les autres personnages, pour leur part, en sont tous à la version originale de ce jour. Voilà qui complique les choses : non seulement Paulo Paul revit continuellement la même journée, mais en plus, il est, dans son entourage, la seule victime de ce phénomène !


13. certaines personnes s'entendent bien dès le début...

Autre réflexion ironique qui sert à tenter de rationaliser la réaction du chaton à l'égard de Paulo. Le lecteur comprend, une fois qu'il connaît la fin de ce récit, que le phénomène est tout autre et n'a rien de rationnel -- de là l'ironie.  Les connaissances ayant trait aux relations interpersonnelles et la possibilité de rattacher la réaction du chaton à cet aphorisme servent elles aussi d'interactant dans le discours dialogique.

L'inérêt de cette proposition provient aussi du fait que le lecteur ignore si cette tentative d'explication émane du narrateur ou du personnage -- en style indirect libre, dans la seconde éventualité.


14. Ayant peur d'arriver en retard

Autre preuve que le temps est une notion qui préoccupe ce personnage.


15. Ce matin, par une journée...

Tout le dernier paragraphe sert, bien entendu, à boucler la boucle : c'est ici que le lecteur comprend qu'une fois franchi minuit, tout recommence -- et ce, malgré l'épisode précédent, qui permet de croire (sans qu'on en ait la certitude) que Paulo Paul a été victime d'un accident qui aurait dû le tuer (il s'agit d'un face-à-face en automobile).