«Quelqu'un qui se tape 90 g de protéines avec un supplément après l'entraînement, il y en a 70 qui servent à rien» - Benoît Lamarche, spécialiste en nutrition sportive à l'Institut des nutraceutiques et des aliments fonctionnels
Marc Allard, Le Soleil
(Québec) Les suppléments de protéines et de créatine sont populaires chez les jeunes athlètes, qui les voient souvent comme des éléments essentiels à une bonne nutrition.
Le Soleil a demandé à un vendeur musclé du magasin de suppléments GNC, à Place Ste-Foy, ce qu'il en pensait. Pour prendre de la masse, a-t-il expliqué, il faut manger beaucoup de protéines. À moins de «bouffer six repas par jour», a-t-il dit, la poudre de petit lait est impérative.
Ce discours, bien des jeunes sportifs qui font de la musculation l'endossent. Ils savent qu'on ne peut pas gagner du muscle sans un apport suffisant de protéines, qui permettent aux muscles de se reconstruire et de grossir.
Ce qu'ils semblent ignorer, toutefois, c'est que plusieurs études montrent qu'après avoir consommé 20 g de protéines après un entraînement, il n'y a plus de gain sur la masse musculaire, souligne Benoît Lamarche, spécialiste en nutrition sportive à l'Institut des nutraceutiques et des aliments fonctionnels.
«Dans un petit steak, t'en a plus que ça, dit-il. Quelqu'un qui se tape 90 g de protéines avec un supplément après l'entraînement, il y en a 70 qui servent à rien.»
À ceux qui ne pourraient pas se faire cuire un steak dans les heures suivant l'entraînement, Benoît Lamarche suggère de manger un bon yogourt et de boire un lait au chocolat en attendant de manger un repas.
Dans de très rares cas, chez les végétariens, notamment, les suppléments protéinés peuvent compenser un manque de protéines, remarque M. Lamarche. Mais chez la grande majorité des jeunes athlètes, ils sont complètement inutiles avec une alimentation normale.
Benoît Lamarche est un peu plus mitigé concernant la créatine. Présente naturellement dans le corps, la créatine permet de donner rapidement de l'énergie aux muscles et ainsi de soutenir des efforts intensifs de courte durée plus longtemps (comme soulever des poids).
«Si tu fais ça pendant un an de temps, dit-il, c'est sûr que tu vas être plus fort, parce tu t'es entraîné plus fort.» Les études scientifiques sont très claires là-dessus, assure-t-il. Ce qui ne veut pas dire qu'il faut la recommander.
Comme pour les suppléments de protéines, ceux de créatine ne sont pas toujours sécuritaires, précise le spécialiste. Dans certaines usines qui en fabriquent, des stéroïdes peuvent s'y glisser.
Mais selon Benoît Lamarche, les jeunes athlètes et leurs parents devraient d'abord se questionner sur la pertinence de consommer ce supplément à un niveau scolaire. «Des jeunes au secondaire qui s'entraînent dans une équipe de football, même si c'est la meilleure au Canada, moi, je m'excuse, mais je ne pense pas que ça devrait être dans l'arsenal nutritionnel de ces jeunes-là, dit-il. Ceci étant dit, ça ne les tuera pas.»
«Conduites dopantes»
Comme M. Lamarche, Christiane Ayotte, spécialiste en contrôle du dopage à l'Institut national de recherche scientifique, à Laval, estime qu'au-delà du débat nutritionnel, endosser la prise de suppléments revient à encourager des «conduites dopantes» qui peuvent mener les jeunes athlètes à des substances interdites, comme les stéroïdes.
«Qu'est-ce qu'on passe comme message? dit-elle. "Quand tu seras tanné de niaiser, tu passeras aux affaires sérieuses.»
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